Située dans la partie la plus étroite de la presqu’île de Thaïlande, Prachuap Khiri Khan est littéralement coincée entre la Birmanie à l’ouest et le Golfe de Thaïlande à l’est, avec en un point à peine 11 kilomètres entre les deux.
Passage obligé entre le centre et le sud du pays, ce port de pêche est une paisible cité balnéaire loin de l’effervescence de sa voisine Hua Hin et des îles. Trop souvent délaissée par les touristes étrangers, elle a su garder son authenticité. Ici, vous aurez plus de chance de croiser des familles thaïlandaises venues s’échapper de Bangkok le temps d’un long week-end que des « farangs ».
Chef-lieu de la province qui porte le même nom, la ville a depuis toujours plus concentrée son activité sur la gestion administrative de la région et ses ressources naturelles plutôt que sur le tourisme. Du coup, il s’en dégage un charme paisible, presque une nonchalance. La baie offre un panorama remarquable que l’on pourrait comparer à ceux de Phang Nga ou de Krabi. On peut y observer les mêmes pics rocheux semblant affronter l’océan et se laisser séduire par la magie du lieu le temps d’une escale.
Vous pourrez aussi décider de vous promener à pied ou à vélo le long du front de mer, d’y admirer les nombreuses maisons traditionnelles en bois, certaines affichant plus de 100 ans au compteur. Et d’aller déguster du poisson ou des fruits de mer dans les nombreux restaurants et échoppes de la ville pour un rapport qualité-prix à défier toute concurrence. Ou encore flâner dans le petit marché de nuit essentiellement constitué de stands de nourriture qui prend place chaque soir sur l’esplanade devant la mairie, ou sur celui bien plus grand et plus animé qui s’installe le long de la mer chaque vendredi et samedi soirs.
Pour prendre de la hauteur et avoir une vue d’ensemble, rien ne vaut l’ascension des 460 marches de la colline de Khao Chong Krajok, au nord de la ville, pour une visite du Wat Thammikharan et une vue à 360 degrés de la chaîne de montagnes en territoire birman aux baies d’Ao Noï, de Prachuap et d’Ao Manao.
Vous vous sentez une âme de sportif ? Attaquez-vous alors à la montagne de Khao Lommuak plus au sud, où après avoir péniblement gravi les 615 marches le chemin tortueux continue encore un moment, et ce n’est qu’avec l’aide d’une corde que vous pourrez grimper jusqu’au sommet. Si une telle escalade vous décourage, n’évitez pourtant pas l’endroit. Au pied de la colline, des singes langur à lunettes y ont élu domicile, une espèce beaucoup plus docile et calme que les traditionnels macaques que vous pourrez voir à Khao Chong Krajok. Les langur viendront gentiment prendre la nourriture que vous leur offrez et si vous avez de la chance, peut-être pourrez-vous voir un des bébés singes. Leur particularité : ils sont jaunes comme des poussins !
Après tous ces efforts, offrez-vous un moment de détente à Ao Manao, à 3 km au sud de la ville, une plage située dans la base militaire Wing 5 Air Force. La seule formalité qui vous sera demandée sera de remplir le registre à l’entrée de la base. Loin de l’image autoritaire des militaires en France, à Ao Manao, la présence de l’armée de l’air permet surtout de maintenir la plage belle et propre dans une ambiance toujours souriante ainsi que de limiter une expansion à la verticale de la ville.
En effet, à cause de la présence d’une piste d’atterrissage, les bâtiments ne peuvent dépasser les sept ou huit étages. Pour la petite histoire, il faut savoir que Prachuap Khiri Khan, et plus spécialement Ao Manao, fut l’un des sept points d’entrée par lesquels les Japonais ont envahi la Thaïlande le 8 décembre 1941(1). Après une bataille d’un peu plus de 24 heures, l’armée de l’air de Wing 5 reçut un télégramme demandant un cessez-le-feu immédiat, la Thaïlande ayant signé un armistice avec le Japon. Si l’ordre a été immédiatement suivi dans les six autres bases, les aviateurs de Prachuap Khiri Khan crurent à une ruse des Japonais et continuèrent à se battre jusqu’à l’arrivée, trois heures plus tard, d’une voiture occupée par des représentants du gouvernement thaïlandais venus leur ordonner de capituler. Plusieurs noms de rue commémorent l’invasion de la Thaïlande : Phithak Chat (défense du pays), Salachip (le sacrifice de la vie) et Suseuk (la Bataille). Une résistance ou une non-obéissance à un ordre du gouvernement qui, aujourd’hui encore, fait la fierté des habitants.
A Prachuap, il n’y a que ça à faire : profiter de la plage, louer un kayak et remonter la rivière, s’offrir une partie de golf dans la base militaire ou pousser son exploration un peu plus loin du côté du village de pêcheur d’Ao Noï et de ses grottes aux bouddhas, du village de Klong Wan, de l’aquarium ou encore du parc scientifique de Wangkor.
Pour les cocktails et les soirées, passez votre chemin, la vie nocturne est pour ainsi dire inexistante. Vous vous contenterez d’une bière dans l’un des rares bars de la ville, l’occasion de discuter avec d’autres touristes, quelques expatriés, quelques Thaïlandais, et de glaner des informations complémentaires sur la ville à défaut d’en avoir reçues lors de votre visite à l’Office du tourisme. Rassurez-vous, ce n’est pas parce que l’Office du tourisme n’aura pas pu suffisamment vous aider que la ville ne dispose pas de toutes les facilités habituelles – hôtels, guest-houses, restaurants, transports, location de vélos ou de scooters. Vous trouverez sans problème tout ce dont vous avez besoin pour une pause en pleine zénitude.
Chaque semaine, recevez Gavroche Hebdo. Inscrivez vous en cliquant ici
Catherine Vanesse
(1) L’invasion de la base par les Japonais est racontée avec force détails dans « The Last Siamese, journeys in war and Peace », de Teddy Spha Palasthira, paru aux éditions Post Books.
Article publié dans le Gavroche d'avril 2014